L'affaire Palmstråle : Retour de marchandises et exonération de la TVA dans la jurisprudence de l'UE
-iipdguuz9p.webp)
🎧 Vous préférez écouter ?
Obtenez la version audio de cet article et restez informé sans lire - parfait pour le multitâche ou l'apprentissage en déplacement.
Introduction
Depuis son origine, le système de TVA de l'UE est conçu pour garantir la neutralité fiscale et éviter la double imposition, en particulier dans le cadre des mouvements transfrontaliers de marchandises. La directive 2006/112/CE vise également à éviter la fraude et les systèmes de double non-imposition qui peuvent dissimuler des intentions frauduleuses. De la même manière, le code des douanes de l'Union (UCC) vise à offrir une sécurité juridique et une uniformité aux entreprises, ainsi qu'à renforcer des procédures douanières plus rapides pour les opérateurs économiques conformes et dignes de confiance (OEA).
L'article 143, paragraphe 1, point e), de la directive TVA prévoit l'exonération de la TVA sur les biens réimportés par la même entité que celle qui les a exportés, à condition qu'ils soient exonérés de droits de douane. Toutefois, l'application de cette exonération peut s'avérer complexe lorsque des irrégularités procédurales se produisent au cours des opérations douanières. L'affaire C-125/24 (Palmstråle) de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) constitue une référence clé pour comprendre l'impact des violations formelles sur l'exonération de la TVA lors de la réimportation.
Cadre juridique
La directive 2006/112/CE, en vertu de l'article 143, paragraphe 1, point e), impose aux États membres d'exonérer de la TVA la réimportation de biens, en demandant à l'opérateur de prouver que les biens sont dans le même état que lorsqu'ils ont été exportés. Cette exonération est soumise à certaines exigences formelles, notamment une notification en bonne et due forme aux autorités douanières.
En outre, le règlement (UE) n° 952/2013 (Code des douanes de l'Union - UCC), à l'article 203, exonère de droits de douane les marchandises initialement exportées de l'Union et réimportées dans un délai de trois ans, si elles sont déclarées pour la mise en libre pratique. Les articles 203.5 et 203.6 stipulent que la réimportation doit avoir lieu dans le même État membre que celui où les marchandises ont été exportées et doit être étayée par des documents prouvant le respect de ces conditions.
Dans l'affaire Palmstråle, aucun droit de douane n'a été perçu, mais l'exonération de la TVA a été refusée en raison d'un prétendu manquement à la procédure, invoquant l'article 79 de l'UCC, qui stipule qu'une dette douanière naît lorsque des obligations ne sont pas respectées, même en l'absence d'intention.
Législation nationale pertinente
Bien que la loi suédoise sur la TVA ait été modifiée en 2023 (2023:200), la législation précédente (1994:2000) s'appliquait en l'espèce puisque les événements s'étaient produits antérieurement. Selon les règles antérieures, la TVA était due sur les biens importés de pays tiers. Toutefois, la loi suédoise 1994:1551 autorisait l'exonération de la TVA sur les biens réimportés s'ils pouvaient bénéficier de l'exonération des droits de douane en vertu de l'article 203 UCC.
Scénario factuel et question juridique présentée à la Cour
Un particulier suédois (AA), propriétaire de chevaux de compétition, a exporté deux chevaux de Suède en Norvège pour un événement sportif et les a ensuite réimportés en Suède. Toutefois, à leur retour, aucune déclaration douanière formelle n'a été présentée à la frontière ; seul un bref contrôle a été effectué auprès des autorités douanières suédoises (Tullverket).
En conséquence, les autorités douanières ont émis une demande de TVA de 41 178 SEK (environ 3 500 €), bien qu'elles n'aient appliqué aucun droit de douane. Selon elles, l'exonération de la TVA n'était pas applicable car l'importateur n'avait pas déposé de déclaration de mise en libre pratique ni demandé explicitement l'exonération douanière.
Le contribuable a contesté la décision devant le tribunal administratif suédois, qui a rejeté le recours, estimant que l'absence de déclaration douanière formelle empêchait l'exonération de la TVA. Le tribunal a souligné qu'une déclaration formelle de mise en libre pratique est une condition essentielle.
L'affaire a été portée devant la cour administrative d'appel de Göteborg, qui a confirmé le jugement. L'affaire a finalement été portée devant la Cour administrative suprême de Suède, qui a posé une question préjudicielle à la CJUE. La question était de savoir si les articles 143 de la directive TVA et 86 et 203 de l'UCC exigent que des conditions de fond et de procédure soient remplies pour l'exonération de la TVA.
Analyse juridique
L'affaire concerne les "biens en retour", c'est-à-dire les biens exportés de l'UE et réimportés ultérieurement sans modifications substantielles. L'article 143, paragraphe 1, point e), de la directive TVA, qui autorise l'exonération des biens réimportés déjà exonérés de droits de douane, est au cœur du litige. La partie requérante soutient que l'exonération de la TVA devrait dépendre uniquement de conditions de fond, et non de conditions de procédure, pour autant qu'il n'y ait pas d'intention frauduleuse.
L'article 86, paragraphe 6, de l'UCC autorise l'exonération des droits de douane même si les procédures n'ont pas été strictement suivies, s'il n'y a pas de fraude. La question centrale est de savoir si l'exonération de la TVA doit également s'appliquer dans de telles situations et si une violation des procédures entraîne automatiquement l'assujettissement à la TVA.
Dans le cas présent, la réintroduction des chevaux n'a pas respecté les formalités prévues à l'article 203 UCC. Les autorités soutiennent donc qu'une obligation en matière de TVA découle de l'article 79. Le débat juridique porte sur la question de savoir si l'exonération de la TVA peut toujours s'appliquer malgré les erreurs de procédure, sur la base du principe selon lequel la substance doit prévaloir sur la forme.
Conclusions de l'avocat général
Selon l'avocat général, le libellé de l'art. 143, paragraphe 1, point e), en particulier dans la version allemande, suggère que l'exonération peut s'appliquer même si les procédures douanières n'ont pas été strictement suivies, contrairement à l'article 143, paragraphe 1, point f), qui exige des formalités spécifiques. Historiquement, la raison d'être de l'exonération des biens en retour découle de la sixième directive TVA, qui vise à éviter la taxation des biens non consommables.
La TVA étant une taxe sur la consommation, les biens réimportés sans créer de nouvelle consommation ne devraient pas être taxés. L'objectif de l'exonération est distinct de celui des droits de douane, qui protègent la production intérieure. Par conséquent, le non-respect des formalités douanières ne devrait pas empêcher l'exonération de la TVA s'il n'y a pas de consommation imposable.
Bien que la TVA et les droits de douane soient liés d'un point de vue opérationnel, ils reposent sur des bases différentes : les droits dépendent de la procédure et impliquent des obligations strictes, tandis que la TVA est basée sur la nature de la consommation. Ainsi, une infraction formelle peut créer une dette douanière, mais pas nécessairement une obligation en matière de TVA, à moins que la consommation effective au sein de l'UE ne soit prouvée.
L'avocat général conclut que l'article 143, paragraphe 1, point e), n'exige pas un respect formel absolu pour l'exonération de la TVA. Ce qui importe, c'est que les conditions de fond soient remplies, c'est-à-dire que les marchandises soient réellement des marchandises en retour. En l'absence d'intention frauduleuse, l'article 86(6) UCC peut justifier l'exonération des droits de douane et, par extension logique, de la TVA. Toutefois, il appartient à la juridiction nationale de déterminer si le vice de procédure constitue une tentative d'évasion.
Considérations finales
L'affaire Palmstråle soulève des questions fondamentales sur la relation entre les réglementations douanières et fiscales. Le point de vue de l'avocat général met en évidence le principe de la primauté du fond sur la forme, affirmant que le respect des conditions matérielles devrait l'emporter sur les erreurs formelles non intentionnelles. Si la CJUE suit ce raisonnement, elle pourrait élargir le champ d'application de l'exonération de la TVA dans les cas de réimportation, offrant ainsi une plus grande sécurité juridique aux contribuables de bonne foi.

Articles en vedette

The Windsor Framework: Key Changes to the Northern Ireland Protocol After Brexit
🕝 April 25, 2025
Liability for VAT in Copyright Transactions: Key Takeaways from the UCMR-ADA Case
🕝 April 22, 2025-wfmqhtc7i6.webp)
CJEU Case C-68/23: Digital vouchers and VAT - Clarifying the line between Single- and Multi-Purpose Vouchers
🕝 April 21, 2025
Vente d'une voiture de société à l'administrateur-actionnaire : Les limites juridiques de la TVA dans la jurisprudence néerlandaise
🕝 April 15, 2025Plus de nouvelles de L'Europe
Obtenez des mises à jour en temps réel et des informations sur l'évolution de la situation dans le monde entier, afin d'être informé et préparé.