Les ajustements de prix de transfert doivent-ils être soumis à la TVA ? Arcomet Towercranes SRL (Affaire C-726/23)
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La relation entre la TVA et les prix de transfert est depuis longtemps complexe et souvent source de malentendus dans la pratique fiscale internationale. En effet, ces deux aspects des transactions intragroupes sont souvent régis par des principes différents et poursuivent des objectifs différents, même s'ils impliquent tous deux des obligations de conformité.
La TVA et les prix de transfert ont des objectifs distincts. La TVA est un impôt indirect sur la consommation appliqué proportionnellement à la valeur des biens et des services. En revanche, les prix de transfert sont un concept lié à la fiscalité directe, qui vise à répartir les bénéfices de manière appropriée entre les parties liées et à garantir que le prix des transactions est fixé dans des conditions de pleine concurrence, afin d'éviter l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices.
Par conséquent, les normes relatives à l'assujettissement à la TVA ou à la déduction de celle-ci ne sont pas toujours alignées sur celles utilisées pour déterminer si un accord de TVA est acceptable.
En avril 2025, l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), Jean Richard de la Tour, a rendu un avis dans l'affaire C-726/23, SC Arcomet Towercranes SRL contre Direcția Generală Regională a Finanțelor Publice București. Cette affaire soulève des questions importantes concernant les ajustements de prix de transfert et leurs implications pour la TVA. En particulier, elle pose la question de savoir si ces ajustements peuvent être soumis à la TVA et si les autorités fiscales peuvent demander des documents autres qu'une facture pour valider le droit de déduire la TVA en amont.
S'il est confirmé par la Cour, l'avis de l'avocat général pourrait avoir une incidence considérable sur la manière dont les prix de transfert - traditionnellement régis par les règles de la fiscalité directe - interagissent avec les systèmes de fiscalité indirecte tels que la directive européenne sur la TVA. Bien que la décision finale de la CJUE n'ait pas encore été rendue, cette affaire, ainsi que celle de Stellantis Portugal (C-603/24), pourrait refléter un changement plus large dans le traitement des transactions intragroupes.
Aperçu de l'affaire : Arcomet et le litige TVA
Le litige opposait Arcomet Romania à son siège social belge, Arcomet Service NV. Le demandeur est membre du groupe Arcomet et est spécialisé dans la location de grues.
En 2012, la filiale roumaine et son siège belge ont conclu un accord visant à aligner la marge d'exploitation de la filiale sur les références du marché, sur la base d'une étude de prix de transfert appliquant la méthode transactionnelle de la marge nette (TNMM). La marge opérationnelle cible a été fixée entre -0,71% et 2,74%. Si la marge réelle se situait en dehors de cette fourchette, le siège émettait une facture d'égalisation annuelle.
Entre 2011 et 2013, Arcomet Roumanie a dépassé les marges convenues et a reçu trois factures d'ajustement de la TP de la part de son homologue belge. Deux d'entre elles ont été traitées comme des services intracommunautaires soumis au mécanisme d'autoliquidation. La troisième a été considérée comme hors du champ d'application de la TVA par l'entité roumaine.
Les autorités fiscales roumaines ont contesté ce point de vue, arguant que les services n'étaient pas correctement justifiés et qu'ils ne pouvaient donc pas bénéficier d'une déduction de la TVA. Elles ont imposé la TVA, des pénalités et des intérêts, rejetant l'argument d'Arcomet selon lequel les montants correspondaient à des affectations internes au groupe non imposables.
En conséquence, deux questions préjudicielles ont été posées à la CJUE :
L'article 2, paragraphe 1, point c), de la directive TVA (2006/112/CE) prévoit-il qu'un ajustement du prix de transfert entre parties liées constitue la rémunération d'un service soumis à la TVA ?
Si, en vertu des articles 168 et 178, les autorités fiscales peuvent exiger des documents autres que la facture pour justifier le droit du contribuable à déduire la TVA.
Les conclusions de l'avocat général
En répondant à ces questions, l'avocat général a adopté une approche au cas par cas, rejetant l'idée d'une exonération générale de la TVA pour les ajustements de prix de transfert.
En ce qui concerne la première question, l'avocat général a souligné que si les principes de l'OCDE en matière de prix de transfert sont élaborés à des fins de fiscalité directe, la TVA est un impôt basé sur la consommation qui repose fondamentalement sur l'existence d'une transaction réciproque. En particulier, le concept de "valeur normale" a des implications différentes : dans le cadre de la TP, il sert de référence pour la fixation des prix de pleine concurrence ; dans le cadre de la TVA, il s'applique généralement dans des contextes anti-abus pour définir le montant imposable.
En outre, les ajustements en matière de TVA peuvent être initiés par le contribuable (ajustements compensatoires) ou ex post par les autorités fiscales (ajustements primaires, corrélatifs ou secondaires). Selon le groupe d'experts TVA, les ajustements effectués uniquement par les autorités fiscales ne constituent pas la contrepartie d'une livraison de biens ou d'une prestation de services et n'entrent donc pas dans le champ d'application de la TVA. Toutefois, si l'ajustement découle d'un accord contractuel ou concerne des différences entre les coûts réels et les coûts budgétés (par exemple, pour le marketing ou l'administration), il peut donner lieu à un assujettissement à la TVA.
Dans l'affaire Arcomet, l'AG a constaté l'existence d'un service et d'une rémunération correspondante. Le siège social assumait les risques liés à la stratégie commerciale, à la planification, à la négociation des contrats et à la gestion de la flotte, tandis qu'Arcomet Romania achetait et possédait l'équipement et gérait les locations. La structure de paiement, convenue à l'avance et inscrite dans un cadre contractuel, constituait une forme de contrepartie pour les services rendus, plutôt qu'un simple ajustement interne. Elle répondait donc aux critères d'application de la TVA en vertu de l'article 2, paragraphe 1, point c).
En ce qui concerne la deuxième question, l'avocat général a noté qu'en vertu des articles 168 et 178 de la directive TVA, et conformément au principe de proportionnalité, les autorités fiscales peuvent exiger des pièces justificatives autres que la facture pour établir que les services en amont ont été utilisés dans le cadre d'activités imposables.
La jurisprudence de l'UE confirme que la TVA en amont est déductible lorsque l'acquéreur est un assujetti et que les biens ou les services sont utilisés pour des opérations imposables en aval. Un lien direct et immédiat doit exister entre les intrants et les extrants, ou le coût des intrants doit être un élément du prix final de l'extrant. Dans le cas d'Arcomet, les services fournis par le siège social faisaient clairement partie du modèle de tarification utilisé par l'entité roumaine.
Par conséquent, bien que les exigences formelles telles que les factures soient importantes, le principe de neutralité exige que le droit à la déduction soit accordé lorsque les conditions de fond sont remplies. L'avocat général a souligné que la demande de preuves supplémentaires est compatible avec la proportionnalité, en particulier pour vérifier l'existence de ces conditions de fond. Ce point de vue s'aligne sur des arrêts antérieurs de la CJUE, tels que Weatherford Atlas Gip (C-527/23), qui soulignaient la nécessité de transparence dans les flux intragroupes.
Conclusions
L'affaire Arcomet marque un changement potentiellement important dans l'interaction entre la taxe de vente et la TVA. Le paysage juridique actuel reste incertain et fragmenté. Le manque d'orientations administratives, les avis divergents des organes de l'UE et les pratiques nationales incohérentes augmentent le risque de double imposition et d'inégalité de traitement.
La confirmation de l'avis de l'AG pourrait entraîner des changements dans la manière dont les entreprises abordent la documentation relative à la taxe sur la valeur ajoutée et la conformité à la TVA, en particulier en ce qui concerne l'étendue des services, les structures de rémunération et leur lien avec les résultats imposables.
Dans ce contexte, l'affaire Stellantis Portugal (C-603/24), toujours en cours, pourrait apporter des éclaircissements supplémentaires. Cette affaire traite également des ajustements post-période et pose la question de savoir s'il s'agit de nouvelles prestations ou de simples ajustements comptables sans conséquences sur la TVA.
Ensemble, Arcomet et Stellantis sont le signe d'un effort plus large de l'UE pour clarifier le traitement de la TVA des transactions intragroupes et renforcer le fait que la TVA ne peut pas être négligée dans les accords de TP.

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